Memoria
Je suis en retard dans ma mémoire.
Il y a tout ce fourbi, ce bazar. Toutes ces incohérences. Grenier de mots et d'images, de sentiments, de sensations. Je me fraie un passage entre les mots, entre les lignes, entre les ombres. A vouloir faire trop bien, ou trop vite, je me cogne à un angle et mon visage se crispe. Mon souffle se fait court. Je retiens un juron. A quoi bon? On ne peut, jamais, se protéger de tout.
La vie se fait, se défait. La vie tangue; parfois la vie bascule, vacille. S'éteint et puis renaît, on ne sait pas pourquoi. On ne sait trop comment. Elle est là, où l'on ne s'attend pas.
Je récuse, je refuse. Je suis ce que je suis. Un peu plus prudente, juste un peu moins naïve, comme après une chute, et quand on se relève, et qu'on a peur après. Et qu'on a peur après..
Je suis en retard dans ma mémoire.
Je ne sais plus où j'en suis restée. Je ne me souviens plus de l'histoire. Entre "il était une fois" et il ne sera plus. Je pleure dans ma mémoire, ne retiens pas mes larmes. Mon poing vient s'écraser, au hasard, quelque part.. Ça y est cette fois je pleure. Je ne voulais pas ça. Non, je ne voulais pas. Car je te voulais toi. Tu ne voulais que ça. C'est comme ça. C'est comme toi. Et je me fais violence. Car on se fait violence. Car ça ne suffit pas, la seule souffrance de toi. Ton absence et ta loi. Oh, je ne t'accuse pas non, je ne t'accuse pas.
Tout tourne autour de moi. Je suis dans un manège, la musique, les notes, tout tourne autour de toi. La musique, tes mots. Rien n'a plus d'importance. Ce qu'on garde, un jour, ne vaut pas pour toujours, mon amour tu le sais.
Un souffle, un courant d'air, mes yeux s'ouvrent à nouveau. Demi-tour sur moi-même. Le temps s'est arrêté. Il est tard je le sais. L'épreuve est terminée. Un chat miaule, le soir tombe. C'est tranquille, paisible, c'est trop tôt ou trop tard.
Memoria