Je m'ennuie.

Pourquoi cette impression de perte de temps soudain, qui m'envahit?

Est ce simplement parce que, le reste du temps, je suis trop occupée?

Je m'ennuie..; je ne sais pas si cela me plait ou non. Je ne sais pas par quoi remplacer ce sentiment ou cet état, et si je dois le remplacer, vraiment.

Mes pensées vagabondent, virevoltent, sans se fixer. L'ennui est-il utile? Est-il bienveillant? Y a t-il des raisons pour tromper mon ennui? Suis je capable de le noyer? Suis je capable de le traverser? Suis je capable de m'ennuyer et d'aimer mon ennui??

Les uns après les autres, je saisis les objets divers, contemporains qui se présentent à moi, qui me sont familiers. Ils sont censés me distraire, m'accompagner dans mon quotidien. Répondre à mes besoins. Grâce à eux, je ne suis pas seule. Je ne peux me sentir abandonnée, livrée à mon propre sort. Mon sort individuel. Car ces objets -mon téléphone, mon ordinateur- me rattachent au bruit trépidant de la vie, aux autres aussi.

Mais je les repose aussi vite. Ils ne me sont, pour l'heure, d'aucune utilité. Je soupire.

Et si mon ennui me donnait pour une fois l'occasion de ne rien faire? Pas de ne rien vivre, mais de vivre pour rien?

Pour une fois, pour une fois que le pouls du temps est lent..

Pour une fois qu'il m'invite dans sa valse, la valse du temps..

Et si je prenais le temps..? Que je le laissais s'emparer de moi, me saisir, instant après instant? Comme on sautille quand on est un enfant, au jeu de marelle, à cloche-pied, jusqu'à l'étape suivante, pour atteindre le ciel?

Un sourire me vient à cette évocation joyeuse, insolite; mon esprit s'abandonne aux images simples d'autrefois, tout à coup tellement réelles. Je les laisse s'imprimer, insuffler leur douceur à mon imaginaire, libéré de son carcan de rentabilité.

Un oiseau siffle haut dans le ciel. Un enfant crie, dans la rue. Je regarde ma montre, par pur réflexe. Car mon bien être désormais échappe aux aiguilles du temps.

Car il est devenu mien. Car il s'est souvenu de moi. Car je me suis reconnue en lui. Car nous nous sommes apprivoisés.

Et que rien ni personne ne saurait remplacer la richesse de cet instant. Juste fait pour moi. A ma mesure.

L'ennui moderne

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